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sentiment d'hostilité très profonde envers quelque-chose ou quelqu'un De Wikipédia, l'encyclopédie libre
La haine est un sentiment personnel de détestation, d'hostilité ou d'exécration très forte à l'égard de quelque chose ou de quelqu'un[1].
Dans la philosophie aristotélicienne puis chrétienne, la haine est vue comme un vice[2]. Dans sa Rhétorique, Aristote définit la haine comme une forme d'hostilité dont l'objet est un groupe de gens, au contraire de la colère qui concerne des individus : il donne l'exemple de la haine envers les voleurs que selon lui tout le monde ressent sans avoir besoin d'être concerné personnellement[2]. Par la suite, dans l'épître aux Romains, Paul de Tarse enjoint aux judéo-chrétiens de ne pas haïr leurs oppresseurs, car cela serait mal[2].
En 1826, William Hazlitt publie sa collection d'essais Du plaisir de haïr, dans lesquels il fait valoir entre autres que les enfants, les femmes, les idiots et les moralistes seraient plus haineux que lui et ses pairs[2].
Selon William Marx, on peut repérer quatre formes de haine de la littérature dans l'histoire: la religieuse, manifestée notamment dans le bûcher des Vanités, la burlesque, exemplifiée par l'auto-dérision de Francesco Berni, la familiale, exprimée par l'homophobie de Tanneguy Le Fèvre, et la fantasmée, que Gustave Flaubert et Émile Zola placent dans la bouche des bourgeois[3].
La psychanalyste Marie-Claude Defores considère la haine comme une force délibérément déstructurante et déshumanisante, arme principale de la perversion : « Il est important de distinguer l'agressivité, qui est une pulsion de vie, de la haine, qui est une force de dépersonnalisation… La haine peut prendre les formes les plus socialisées ; elle refuse le nouveau, tourne vers le passé, produit la répétition et dépersonnalise[4]. »
Allant dans le même sens, Heitor de Macedo affirme :
« La haine n'attrape pas la vérité, elle l'enserre à l'intérieur d'une pensée immobile où plus rien n'est transformable, où tout est pour toujours immuable : le haineux navigue dans un univers de certitudes[5]. »
Pour le psychanalyste Pierre Delaunay, « celui qui hait dénie toute existence à l'objet de sa haine ; au point de la supprimer si elle se manifeste moindrement. […] Il pétrifie l'autre en sorte qu'il n'existe que très peu et, si ce n'est pas suffisant, il le tue. L'existence de l'autre, il n'en veut rien savoir »[6].
Saverio Tomasella confirme l'ensemble de ces constats cliniques. Il relie la haine au fantasme, notamment aux fantasmes sociaux de « normalité ». La haine est un puissant moteur de « réussite sociale » et de prise de pouvoir, à l'œuvre autant dans les entreprises, que dans les institutions religieuses et les partis politiques. « L'un des principaux leviers de la haine concerne la condamnation sans appel, comme une assignation d’identité. L'accusation qui annule l’autre sous-entend : je sais qui tu es ; je dis que tu ne vaux rien, tu ne vaux rien. » Le discours haineux tue ; il n’est pas une parole mais un acte destructeur[7].
Pour les psychanalystes Marie-Claude Defores et Yvan Piedimonte, la haine s'impose de façon déguisée :
« Elle ne peut être perçue qu’à partir de l’impact de son intention sur l’âme résonnant dans l’intériorité sous forme de sensations et d’images comme le froid, le figé, l’immobilisation, la pétrification, ce qu’illustre le rêve. La haine, monde de la négation de l’âme, exclut ce qui en est son expression, le sentiment, et empêche la manifestation de ses qualités : mobilité, chaleur et liberté[8]. »
À ce titre, il est possible de définir la haine comme la négation radicale d'une personne. Elle correspond à l'intention de détruire l'autre, en l'attaquant dans son être et son humanité.
En littérature, chez Balzac, la cousine Bette passe sa vie à chercher à détruire une famille. Bette meurt en gardant « le secret de sa haine ».
Un prétexte fréquent donné à la haine est d'accuser la partie adverse d'en être elle-même animée. En tant qu'accusation, elle est en ce sens un outil de manipulation des masses. George Orwell en donne un exemple avec le personnage de Goldstein dans 1984, que le régime utilise pour dériver vers un autre objet que lui le mécontentement de sa population.
La haine de soi est un état psychologique et une expression désignant un sentiment souvent éprouvé par les minorités souffrantes[9] et stigmatisées (physiquement, socialement, psychiquement…) par une maladie héréditaire ou contagieuse, par une couleur de la peau, les suites d'un accident, une situation de stress post-traumatique…)[10]: l'internalisation de l'oppression (en) conduit par exemple à l'homophobie intériorisée, le racisme intériorisé (en), le sexisme intériorisé (en), l'antisémitisme intériorisé, etc. Ce type de marginalisations subies peut déclencher une souffrance, une culpabilité ou de la honte, et chez l'autre, de la pitié ou du mépris alimentant une haine de soi (qui, selon Alberto Eiguer (2013), est à la fois une conséquence et un facteur aggravant[11] qui peut conduire à étendre la haine de soi à la haine de son héritage familial, historique, culturel…)[10].
La haine de soi (pour une personne ou un groupe) peut être résolue par une réconciliation avec soi-même et les siens (pouvant conduire à une estime de soi[12] retrouvée) ou sinon, la personne peut tenter de gommer ce qui est ressenti comme stigmage, pour diminuer la différence ressentie, avec par exemple :
L'expression a été utilisée par Théodore Lessing (1930) dans l'entre-deux-guerres à propos d'une catégorie de personnes juives exprimant un rejet ou un aversion, voire simplement une position critique, à l'égard du judaïsme, de la culture juive, ou des aspirations politiques juives de l'époque[13]. C'est ainsi que Paul Giniewski a sous titré sa biographie critique de la philosophe Simone Weil « ou la haine de soi »[14].
Un discours de haine (ou « discours haineux », « discours de la haine ») désigne un type de discours ou de système qui (au-delà de la violence ou de l'injure ponctuelle en termes de force et de nature[15]) attaque une personne ou un groupe de personnes sur la base de caractéristiques diverses (couleur de peau, ethnie, âge, sexe, orientation sexuelle, religion, etc.). L'Histoire a montré que le discours haineux peut conduire à des suicides[16], lynchages, fusillades de masse[17],[18],[19], attaques par explosifs[20], guerres, crimes de masses et processus génocidaires comme en ex-Yougoslavie et au Rwanda (voir : incitation au génocide)[21].
Ce genre de discours est également appelé « antilocution » sur l'échelle d'Allport (qui mesure le degré de manifestation du préjugé dans une société).Seamless Wikipedia browsing. On steroids.
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