La Grande Loge suisse Alpina (GLSA) est une obédience maçonnique suisse fondée en 1844. Travaillant depuis son origine «À la gloire du Grand Architecte de l'Univers», elle est reconnue par la Grande Loge unie d'Angleterre. La particularité de l'histoire de l'obédience se trouve dans sa volonté au début du XXesiècle de tisser des liens entre la maçonnerie dite «régulière» et celle dite «libérale» ou «adogmatique». En ce sens, en octobre 1921, la GLSA développe l'Association maçonnique internationale (AMI). Cette particularité prend fin entre 1950 et 1966 avec ses ruptures successives de relations avec les obédiences libérales ou non reconnues par la franc-maçonnerie «régulière».
Fondée à l'époque de la naissance de la Suisse moderne essentiellement par des membres du même parti radical qui ont été à l'origine du nouvel État fédéral (comme Jonas Furrer, premier président de la Confédération suisse en 1848 et premier grand orateur de la GLSA en 1844)[1], la Grande Loge suisse Alpina (GLSA) a connu au cours de son histoire (à l’instar de toute la franc-maçonnerie en Suisse) quelques péripéties et quelques crises externes et internes, dont la principale est l'initiative Fonjallaz, visant à interdire les sociétés secrètes en Suisse, refusée par le peuple et les cantons en votation populaire le [2].
Elle connaît aussi la scission de quelques loges en majorité francophones qui ont fondé en 1959 le Grand Orient de Suisse, en 1967 d'autres loges issues de la GLSA demandent à rejoindre le GOS, obédience libérale[3], qui prend alors le nom de Grande Loge de Suisse, et la démission en 1984 d'un Grand-maître en cours de mandat, fait unique dans son histoire, à la suite de la décision prise par la majorité des loges alémaniques contre une minorité de loges romandes de reconnaître la Grande Loge régulière de Belgique et d'enlever sa reconnaissance à la Grande Loge de Belgique, ainsi qu'exigé par la Grande Loge unie d'Angleterre[4].
La GLSA représente en Suisse la franc-maçonnerie dite «régulière», exclusivement masculine, reconnue par la Grande Loge unie d'Angleterre[N 1]. Elle a été fondée en 1844 en tant qu'association selon l'article 60 du code civil suisse. Elle possède sa propre constitution, ses statuts et ses règlements[5].
La plupart des obédiences dites «régulières» postulent que pour devenir maçon il faut impérativement croire en «Dieu, Grand Architecte de l'Univers». Bien qu'appartenant au groupe de reconnaissance mutuelle de la Grande Loge unie d'Angleterre (GLUA), la GLSA affirme pour sa part «qu'elle respecte toutes les convictions sincères et réprouve toute opposition à la liberté de pensée[N 2]».
Cette spécificité est due au fait que la GLSA a longtemps essayé d'être un pont entre les maçonneries anglaise et française[N 3], séparées par la querelle du Grand Architecte de l'Univers et elle a été dans ce sens à l'origine de la création, avec plusieurs autres obédiences européennes et américaines, de l'Association maçonnique internationale (AMI). Cette association a compté jusqu'à 38 obédiences européennes, a rassemblé plus de 500 000 membres et a été réprouvée par la franc-maçonnerie anglo-saxonne[7].
Après la Seconde Guerre mondiale, sous la pression renouvelée de la Grande Loge unie d'Angleterre, abandonnant les tentatives de rapprochement des deux courants maçonniques, le grand maitre Albert Natural dissout l'AMI et rompt toutes relations avec le Grand Orient de France et la maçonnerie libérale en 1950. Il en est de même en 1966, sur les mêmes demandes émanant d'Angleterre, qui amènent la GLSA à rompre également ces relations avec la Grande Loge de France. Ces ruptures successives sont à la source des créations du Grand Orient de Suisse en 1959 et de la Grande Loge de Suisse en 1967[7].
Le , lors de son assemblée générale, la GLSA a adopté une déclaration concernant ses relations avec la franc-maçonnerie féminine en Suisse qui, sans en reconnaitre la régularité maçonnique à laquelle elle adhère au sens strict des pratiques anglo-saxonnes, reconnait toutefois l’activité de la Grande Loge féminine de Suisse (mais pas des loges mixtes). Dans cet acte, elle n'interdit pas les relations avec ses membres ou le partage d'actions communes, en dehors toutefois des travaux des loges, qui restent strictement masculins[8].
En octobre 2009 et pour la première fois, la GLSA fait le choix d'ouvrir les portes de ses locaux à tous les publics dans le cadre d'une journée d’extériorisation[9].
En 2015, la GLSA compte près de 4 000 membres répartis en 85 loges (48 de langue française, 28 de langue allemande, 5 de langue italienne et 4 de langue anglaise)[10].
Parmi ses loges les plus anciennes, elle compte la loge de Genève «L'Union des Cœurs», fondée en 1768[11], qui le est installée dans le Régime rectifié par le grand chancelier provincial de Bourgogne, sous les auspices de Cambacérès, archichancelier de l'Empire et Grand-maître de tous les rites en France[12]; la loge du Locle «Les Vrais Frères Unis», fondée en 1774 avec une patente de la Grande Loge de France[13], la loge de Nyon «La Vraie Union», fondée en 1787, ayant appartenu au Grand Orient de France de 1807 à 1856, date de son entrée à la GLSA [14], et la loge de BâleZur Freundschaft und Beständigkeit(de), fondée sous Napoléon en 1808 avec le titre distinctif «Amitié et Constance» et ayant travaillé en langue française pendant ses trois premières années d'existence[15],[16].
La GLSA publie l'Alpina, revue maçonnique suisse. Fondée en 1874, la revue est publiée à Lausanne en allemand, français et italien[17].
Le groupe de recherche Alpina publie Masonica, une revue de maçonnologie qui réunit les résultats de ses recherches[18].
Les maçons de la Grande Loge suisse Alpina pratiquent les trois grades (apprenti, compagnon, maître) de la franc-maçonnerie symbolique (dite aussi bleue) d'après les rites suivants[19]:
Emile Bonjour, (1862-1941), journaliste et directeur de musée vaudois.
Louis Bonjour, (1823-1875), avocat et homme politique radical vaudois, conseiller d'État (1866-1870) et aux États (1873-1875).
Eugène Borel (1835-1892), avocat et homme politique radical neuchâtelois, député au Grand Conseil de Neuchâtel (1862), conseiller d'État et aux États (1865-1872), conseiller fédéral (1872-1875).
Heinrich Boos(de) (1851-1917), historien bâlois d'origine allemande, professeur à l'Université de Bâle[22].
Emilio Bossi(it)(1870-1920), avocat et homme politique radical tessinois, conseiller national, conseiller aux États et conseiller d'état[23].
Friedrich Brenner(de)(1809-1874), médecin et psychiatre bâlois, en 1855 il fut nommé professeur de psychiatrie à l'université de Bâle, le premier dans une université suisse[24].
Louis Denzler (1806-1880), zurichois, militaire et homme politique radical[27],[28].
Daniel-Henri Druey (1799-1855), homme politique radical vaudois, conseiller d'État (1931-1848), conseiller fédéral (1848-1855), président de la Confédération suisse en 1850.
Jules Eytel (1817-1873), homme politique radical vaudois, avocat au barreau de Lausanne (1840-1862, 1863-1873). Professeur de droit civil vaudois à l'académie de Lausanne (1846-1849). Député au Grand Conseil vaudois (1845-1861), membre puis vice-président de la Constituante en 1861 et conseiller d'État (1862-1863). Député à la Diète fédérale (1845-1847), au Conseil national (1848-1851, 1863-1866, 1870-1873) et au Conseil des États (1862-1863). Il fut un des chefs des radicaux vaudois et il participa à la révolution de 1845.
Alexandre Gavard (1845-1898), homme politique radical genevois, conseiller municipal à Carouge (1873-1877), en 1873 il contribue à la fondation de l'Église catholique nationale de Genève[36], conseiller d'État de Genève (1877) et aux États (1884-1890), professeur d'histoire à l'académie de Neuchâtel (1892-1894)[37],[38].
Ami Girard (1819-1900), homme politique radical neuchâtelois, conseiller d'État (1852-1853) et conseiller national (1860-1869).
Adrien Lachenal (1849-1918), homme politique radical genevois, président de la Confédération suisse en 1896.
Auguste Marmier (1841-1894), homme politique radical fribourgeois, député au Grand Conseil de Fribourg et Conseiller national (1881-1884).
Abram-Daniel Meystre (1812-1870), homme politique radical vaudois, avocat (1852-1855 et dès 1862). Préfet de Lausanne (1845-1852), député au Grand Conseil vaudois (1846-1870), conseiller d'État (1855-1862), conseiller national (1848-1851, 1853-1855 et 1863-1870). Il fut l'un des chefs de file de la révolution vaudoise de 1845.
Alexis-Marie Piaget (1802-1870), homme politique radical neuchâtelois, président du gouvernement provisoire et principal auteur de la constitution cantonale de 1848.
Marc-Emile Ruchet (1853-1912), avocat et homme politique radical vaudois, député, président du Grand Conseil du Canton de Vaud, président de la Confédération suisse en 1905 et 1911.
Louis Ruchonnet (1834-1893), avocat et homme politique radical vaudois, conseiller fédéral de 1881 à 1893, président de la Confédération suisse en 1883 et 1890[39].
Felix Sarasin (1797-1862), bourgmestre bâlois[40],[41].
Le la GLSA et quatre autres obédiences européennes «régulières» (Grandes Loges unies d’Allemagne, Grande Loge d’Autriche, Grande Loge régulière de Belgique, Grande Loge de Luxembourg) réunies à Bâle retirent leur reconnaissance à la Grande Loge nationale française avec une déclaration commune[61], elles sont suivies par la GLUA le . Elles la rétablissent en juin 2015[62], après que la GLUA l'ait à nouveau reconnue comme seule obédience maçonnique régulière en France.
"La question des inter-visites «irrégulières» (les autres critères n'ayant pas été remis en cause) a également joué dans ces incidents avec la GLUA, mais moins qu'on ne le croit: la Grande Loge suisse Alpina fut inquiétée et les relations avec Londres suspendues pour douze à quinze mois, en 1965 puis en 1971, pour cette raison. Alpina donna à chaque fois l'assurance que cela ne se renouvellerait plus et la reconnaissance fut rétablie."[6]
Michel Barat, Alain Bauer et Roger Dachez, Les promesses de l'aube. Contre la guerre des obédiences, pour la franc-maçonnerie de la fraternité, Paris, Éditions Dervy, , p.39
Membre de la Loge «Égalité fraternelle» à Fleurier, où il s'installe en 1851, Robert Giroud, Deux cent cinquante ans de franc-maçonnerie à Bex, Bière, Cabédita, 2014, p. 208.
"Dufour appartenait à la G∴L∴S∴. Alpina où il est curieusement enregistré sous deux de ses quatre prénoms qui ne sont pas ceux habituellement cités, soit Jean Etienne. Il est signataire des "Loix" de la Loge militaire connue sous le titre distinctif de "Loge Léonard et Augustin Bourdillon". Maurice-Robert Morel, Les Trois temples, Loge des trois temples à l’Orient de Carouge, 1788-1988, plaquette commémorative – 200eanniversaire de la création de la Loge, Carouge, 1988, p.15-20.; reproduite sur le site de la Loge Les Trois Temples
J.-B.-G. Galiffe, La Chaîne symbolique, Origine, Développement et Tendances de l'Idée Maçonnique, introduction de Fabrizio Frigerio, Champion-Slatkine, Paris-Genève, 1986 (réimpression de l'édition de Genève de 1852)
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Collectif, Guide suisse du franc-maçon, Histoire et rites, t.1, Lausanne, Groupe de Recherches Alpina, , 362p. (ISBN978-2-9701170-0-1)
Georges Andrey, La franc-maçonnerie à Fribourg et en Suisse du XVIIIe au XXe siècle, Genève, Slatkine, .
Grande Loge suisse Alpina, Livre du 150e anniversaire, 1844-1994, Lausanne, .
Catherine Courtiau et Michael Leuenberger, Loges maçonniques de Suisse, architecture et décors, Berne, Éd. de la Société d’histoire de l’art en Suisse, (ISBN978-3-03797-132-1, lire en ligne).
Michel Cugnet, Deux siècles et demi de Franc-maçonnerie en Suisse et dans le Pays de Neuchâtel, La Chaux-de-Fonds, Éditions du Chevron, (OCLC29745456).
(de) Fabrizio Frigerio, "Freimaurerei", in: Schweizer Lexikon (6 vol.), Lucerne, Mengis & Ziehr, 1991-1993, vol. 2, pp. 738-740.
Robert Giroud, Deux cent cinquante ans de franc-maçonnerie à Bex, Bière, Cabédita, (ISBN978-2-88295-698-9).