En archéologie, une cupule est un pétroglyphe constitué d'une dépression circulaire ou ovale creusée par l'homme à la surface d'un rocher naturel, d'une dalle mégalithique ou d'une paroi de grotte. Une telle roche anthropisée comportant ces cavités hémisphériques est désignée comme «pierre à cupules», «pierre cupuliforme» ou «pierre à écuelles».
L'interprétation de l'usage et des significations des cupules reste difficile, de même que leur datation qui peut s'échelonner depuis le Magdalénien jusqu'à l'Âge du bronze, et parfois être rattachée à d'autres périodes (entre le début du XIVesiècle et la fin du XVIIIesiècle à Madagascar)[2].
Une cupule est une forme de pétroglyphe réalisé à la surface de rochers ou d'affleurements rocheux (dalles, mégalithes). Il s'agit d'une dépression concave, de forme circulaire ou ovale et d'une profondeur de quelques millimètres, martelée généralement à l'aide de percuteurs en pierre (quartz, granit), parfois retrouvés in situ[3]. Les cupules sont généralement de taille modeste, de quelques centimètres ou dizaines de centimètres de diamètre, et ont des parois incurvées et régulières. En deçà de 2 cm, les archéologues parlent plutôt de point; au-delà de 20 cm on parle plutôt de cuvettes, bassins ou vasques, qui résultent le plus souvent d'une érosion différentielle[4],[5].
Une suite de cupules isolées mais alignées forme une ligne de cupules. Si les cupules sont regroupées sur une surface limitée, elles constituent une plage de cupules, lorsqu'elles sont juxtaposées et chevauchantes, ou un nuage de cupules lorsqu'elles sont éparses[6].
Certaines cupules sont entourées par des anneaux concentriques symétriques, également tracés dans la pierre. Parfois, plusieurs cupules sont reliées par une rigole. Leur disposition est en général horizontale mais aussi parfois verticale (mégalithe de la pierre femme, à Vénérieu, dans l'Isère).
Deux types de cupules sont distinguées: les cupules à fonction figurative et les cupules à fonction utilitaire[7].
Les premières interprétations au XIXesiècle proviennent des études sur les surfaces des monuments mégalithiques de l'ouest de l'Europe. Les grandes tendances interprétatives fantaisistes[8] dégagées au contact de ces monuments étaient alors: récolte et évacuation du sang sacrificiel (celtomanie), projection d’un zodiaque ou des constellations visibles (archéoastronomie), forme d’écriture, cadastres préhistoriques, etc. «Et, tout comme ces fameux supports en pierre, dont la compréhension passait inévitablement par une diffusion de l’idée «mégalithique», certains archéologues n’hésiteront pas à envisager une progression est-ouest du phénomène en constatant que des cupules sur affleurements rocheux se retrouvent jusqu’au Caucase (Blavatsky 1880[9])[10]». Les tendances interprétatives actuelles inventoriées par Bednarik(en) sont[11]:
des cuvettes résultant du concassage, broyage (graines, noix ou colorants), affûtage ou polissage de matières, employées comme petit mortier;
des jeux par lesquels d’autres objets (graviers, céréales…) passent d’une cupule à l’autre;
des lithophones, par percussion répétée sur certains points particulier d’un rocher;
des «représentations» dans le cadre de programmes iconographiques portés par un récit mythique ou une cosmogonie particulière (la cupule peut représenter une tête avec ses yeux, les seins ou le sexe féminin d'une représentation anthropomorphe, telle une déesse mère ou une « idole »; un bouclier; servir de départ à des figurations soléiformes[Note 1], etc.).
De plus, ces cupules ont pu être réemployées par des populations qui ne les ont pas produites mais qui les utilisent dans le cadre de libations reliées à des rites de fertilité (dépôts de graines, de matières grasses, de liquides —lait, d'hydromel— ou combustion de matières…) comme le suggèrent les rigoles qui relient parfois ces creux entre eux sur des surfaces plus ou moins horizontales[12]. Elles ont pu être utilisées aussi comme récipients à teinture (godets servant au tatouage)[13], comme trou d'emmanchement, comme puits sacrés[Note 2].
On trouve des formes similaires dans le reste du monde, comme au Mexique, au Brésil, en Inde et en Guadeloupe (à Trois-Rivières). Elles sont très présentes sur les reliefs, particulièrement en montagne[21].
Nuages de cupules associés à des représentations de bateaux et des figurines animales (Stockholm, Suède).
Vidéo montrant comment un liquide s'écoule sur une pierre à cupules (la Pierre aux écuelles, en Suisse).
Cupules ou bassins munis de rigoles et de déversoirs.
Signes solaires avec ou sans rayons. Ces signes peuvent être réduits à de simples points en peinture ou à des cupules en gravure. Exemples: cupules avec rayons, cupule au centre d'un cercle de cupulettes…
Selon Bernard Rio, certaines pierres à cupules en Bretagne peuvent être interprétées comme de petits puits sacrés. L'eau de pluie conservée dans les cupules aurait eu des vertus guérisseuses pour les yeux et ces cupules pourraient aussi être associées à un rite de fécondité, représentant la cavité utérine. Jusqu'au milieu du XXesiècle, dans les fontaines Ar Vir de Plouescat et Saint-Guénaël de Lanester, les pèlerins puisaient l'eau pour la verser sur une pierre à cupules dans lesquelles ils trempaient leurs mouchoirs avant de s'humecter les yeux[14].
Également appelé «Fesses de Sorcière», ce monument mégalithique de la Loire-Atlantique doit son nom à la forme des cavités ovalaires (deux grandes cupules de 25 cm de large et 40 cm de long) qui seraient les empreintes laissées par ces personnages assis sur ce bloc de grès. En réalité, les archéologues considèrent que ces cavités polies sont des pierres à bassins (ici jumelées) servant de meules dormantes néolithiques sur lesquelles on écrasait des céréales ou des baies avec des molettes-pilon[15].
Rafolo Andrianaivoarivony, Ann Harivola Rakotondrazaka et Vololomboahangy Ranivoarisoa, «Les roches anthropisées d’Ambohimanga et d’Ambohidratrimo (Hautes-Terres centrales de Madagascar)», dans Michel Martzluff (dir.), Roches ornées, roches dressées: aux sources des arts et des mythes, Perpignan, Presses universitaires de Perpignan, (DOI10.4000/books.pupvd.4022), p.299-314
Hubert de Pardieu, Émile Buisson, «Les rochers à bassins de la montagne bourbonnaise», Bulletin de la Société préhistorique de France, t.27, no12, , p.563.
Henry de Lumley et al., «Cupule isolée, groupe de cupules isolées, plage de cupules juxtaposées et chevauchantes, nuage de cupules éparses sur les roches gravées de la région du mont Bego. Représentation de l'amas stellaire des pléiades», L'anthropologie, vol.123, no3, , p.485-667 (DOI10.1016/j.anthro.2019.102724)
Serge Cassen, Valentin Grimaud, «La clef de la mer. Une étude des représentations gravées sur la Pierre de Saint-Samson (Côtes-d’Armor). Laboratoire de recherche archéologie et architectures», Lithogénies, vol.1, , p.98 (lire en ligne).
Léonard Kramer et Michel Mauvilly, «Blocs à cupules, des pierres énigmatiques», Cahiers d'archéologie fribourgeoise = Freiburger Hefte für Archäologie, vol.21, , p.20-21 (ISSN1423-8756, lire en ligne, consulté le )
Marcel Baudouin, «La Roche aux Fras, Pierre à 95 cupules et 6 cavités pédiformes, à l'île d'Yeu (Vendée)», Bulletin de la Société préhistorique française, t.11, no10, , p.484-513 (lire en ligne)
Léonard Kramer et Michel Mauvilly, «Blocs à cupules, des pierres énigmatiques», Cahiers d'archéologie fribourgeoise (Freiburger Hefte für Archäologie), vol.21, , p.20-21 (ISSN1423-8756, lire en ligne, consulté le )
Jean-Mary Couderc, Géographie et archéologie des cupules, La Simarre, , 402p. (lire en ligne)