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méthode archéologique De Wikipédia, l'encyclopédie libre
L'archéologie aérienne est une méthode d'archéologie non destructive qui consiste à photographier à moyenne altitude des zones dégagées et à étudier et interpréter les indices recueillis, invisibles au sol.
Trois sortes de modifications, dues à la présence de vestiges enfouis, sont observables sur les photographies obtenues dans des conditions optimales de saison et d'éclairage : modification de niveaux, de couleur du sol ou de développement des cultures. Ces modifications permettent de déceler d'anciennes structures anthropiques qu'il reste ensuite à dater et à préciser.
Dès 1631, et bien avant la possibilité de s’élever dans les airs autrement qu’en gravissant des montagnes pour avoir une vue distanciée des plaines, Pierre Louvet note qu’il est possible de faire des observations phytologiques dont laquelle l’archéologie aérienne saura faire fruit :
« […] Et combien que ladite ville ait été totalement ruinée, neanmoins paroiſſent encore des fondemens forts maſſifs, de forts grandes remarques, de grandes eſpaces de logis, grand nombre de puis & caues, quantité de medailles d’argent & de cuïure ; & principalement quand cette grande campagne eſt enſemencée en bled, on y reconoit encore le cõpaſſement et les endrois des ruës ou le bled eſt plus petit qu’és lieux ou les maiſons étoient báties[1]. »
Le révérend père jésuite Antoine Poidebard, observateur aérien militaire, remarque en 1925 en Syrie sous mandat français qu'au soleil couchant, avec la lumière rasante, des reliefs infimes du sol apparaissaient, trahissant des ruines enfouies qu'il photographie, localise et déclare dans le cadre d'une mission d'étude des routes de Haute-Djezireh[2]. Ces micro-reliefs sont associés, vus du ciel, à des ombres allongées démesurément. Poidebard reconnaît ainsi les forts du limes romain et le tracé des routes caravanières traversant le désert pour atteindre au Sud l'Arabie[3].
Le colonel Baradez réalise des prospections en Afrique du nord, mais les Anglais sont les premiers à institutionnaliser ces recherches, grâce aux moyens techniques du Department of Survey de l'université de Cambridge. Le pionnier anglais de la photographie aérienne, Kenneth St Joseph, développe après la Seconde Guerre mondiale, cette discipline dans les pays tempérés, mettant en évidence dans les champs labourés, nus, les différences de teinte de leur sol (indices pédographiques ou « soil marks (en) »[4]) qui témoignent d'une occupation ou d'une activité de l'homme[5].
C'est dans les années 1960 que dans plusieurs régions françaises, des chercheurs comme Roger Agache ou René Goguey commencent à utiliser de manière spécifique cette méthode de prospection. Le séminaire de topographie historique et de photo-interprétation de l'École des hautes études en sciences sociales de Paris, organisé en 1977 par Raymond Chevallier, a une influence décisive sur le développement et la vulgarisation de cette technique.
L'archéologie aérienne associe un support aérien, généralement l'avion de tourisme, aux prospections archéologiques. L'avion permet de s'éloigner de la surface terrestre, pour prendre du recul afin de mieux saisir les éventuelles traces d'occupation humaine (creusement de fondations ou fossés, édification de murs) qui ont bouleversé la stratigraphie naturelle d'un sol.
Naturel ou cultivé, le sol est un milieu homogène où la croissance de la végétation est régulière sur un territoire donné. Les interventions humaines passées, en rompant cette homogénéité, se signalent par des anomalies de croissance de la végétation[6].
Sur sol nu et asséché en surface, la remontée capillaire d'humidité à la verticale des fossés provoque l'apparition de figures géométriques où le sol apparaît d'une couleur différente ; l'inverse peut également se produire lorsque des fondations enfouies diminuent la réserve d'eau disponible : ce sont des indices hydrographiques[7].
Des interventions agricoles récentes (labours profonds) peuvent faire affleurer des vestiges se traduisant par des traces de couleur différente qui forment les indices pédographiques[8].
Les traces laissées par les interventions humaines affectent en général des formes géométriques, ce qui permet de les différencier des anomalies naturelles aux formes plus irrégulières, et le recul permis par l'observation aérienne aide à cette discrimination.
Les principales périodes de visibilité des traces archéologiques se situent à la fin du printemps, sur les terres cultivées, lorsque les champs de céréales arrivant à maturité trahissent la présence de structures anthropiques. La seconde période correspond à l'hiver, lorsque l'assèchement des terres nues permet les remontées capillaires plus foncées. Les résultats sont toutefois très inégaux selon les années et dépendent en particulier de la géologie et la pédologie du lieu, de la climatologie régionale annuelle (influant sur les réserves hydriques et le niveau phréatique), de la nature des cultures et de la présence au moment opportun, d'un prospecteur archéologique aérien.
Un moyen idéal de prospection est l'avion de tourisme à aile basse avec un pilote et un passager observateur. Un jeu de cartes de l'IGN, au 1/50 000 sera indispensable pour localiser toute découverte nouvelle, qui sera attestée par un groupe suffisant de photographies. Les appareils photographiques reflex modernes, équipés d'un zoom sont suffisants. La localisation des prises de vues par GPS est indispensable.
Les étés secs ou de grandes vagues de chaleur sont propices à la découverte de nouveaux sites, permettant de visualiser ces artéfacts de manière beaucoup plus contrastée[9].
Au retour de mission, les images peuvent immédiatement être visionnées, enregistrées et traitées. Chaque vue est géolocalisée précisément et tous les détails nécessaires à son interprétation sont notés : description des conditions de prise de vue, date, heure, orientation de l'axe du paysage représenté et description des indices archéologiques observés. Chaque photo fait ensuite l'objet d'une analyse archéologique : origine naturelle ou anthropique et, dans ce cas, proposition de datation et de typologie (habitat, enceinte, fossé…). Il faut décréter si les traces sont d'origine naturelle ou anthropique. L'examen de leurs formes et styles permettra d'établir un diagnostic d'appartenance chronologique préliminaire. L'ensemble des données est transmis à l'autorité de tutelle compétente en matière d'archéologie, le Service régional de l'archéologie (ministère de la Culture).
Ces données ont vocation à être portées à la connaissance du monde scientifique mais aussi du public, permettant ainsi la sensibilisation du plus grand nombre de personnes et parfois, l'organisation d'un chantier de fouilles sur un site se révélant particulièrement prometteur.
L'archéologie aérienne est un outil précieux et de mise en œuvre rapide, notamment en préalable à des chantiers de grand ampleur, travaux urbains mais surtout périurbains, construction de routes ou de voies de chemin de fer.
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