L’école du Kerala est une école de mathématiques et d'astronomie fondée par Madhava de Sangamagrama dans la province du Kerala en Inde, et ayant eu entre autres pour membres Parameshvara(en) et Nilakantha Somayaji. Elle prospéra entre le XIVe et le XVIesiècle, s'achevant avec les travaux de Melpathur Narayana Bhattathiri.
Les découvertes mathématiques de l'école anticipent de deux siècles certains des résultats du calcul infinitésimal de Newton et Leibniz (mais non leurs techniques), obtenant par exemple le développement en série entière des fonctions trigonométriques, mais il n'y a pas de preuve que ces découvertes se soient diffusées en dehors du Kerala.
Il a existé sans interruption dans la région du Kerala une grande activité scientifique depuis l'époque d'Aryabhata, mais elle prend une ampleur particulière avec l'arrivée de Madhava de Sangamagrama[1] et la création de son «école» - un système de transmission de savoir de maîtres à élèves à l'intérieur d'illams(en)[2]. Cette école eut entre autres pour membres Parameshvara, Nilakantha Somayaji, Jyeṣṭhadeva(en), Achyuta Pisharati(en), Achyuta Panikkar(en) et Melpathur Narayana Bhattathiri. Elle prospéra entre le XIVe et le XVIesiècle, ses dernières contributions originales étant apportées par les travaux de Narayana Bhattathiri (1559-1632). Pour tenter de résoudre des problèmes astronomiques, l'école du Kerala développa de nouveaux concepts mathématiques; leurs résultats les plus importants — le développement en séries des fonctions trigonométriques — furent décrits en vers sanskrits dans un livre de Nilakantha appelé Tantrasangraha, et dans un commentaire de ce livre, le Tantrasangraha-vakhya, d'auteur inconnu. Ces théorèmes étaient énoncés sans démonstrations; des justifications des séries pour les fonctions sinus, cosinus et arc tangente furent données un siècle plus tard dans le Yuktibhasa (c.1500-c.1610), écrit en malayalam par Jyesthadeva, ainsi que dans un commentaire du Tantrasangraha[3].
Ces travaux, achevés deux siècles avant la découverte du calcul infinitésimal en Europe, contiennent les premiers exemples connus de séries entières (en dehors des séries géométriques)[4]. Cependant, l'école ne développa pas de théorie systématique de la dérivation ou de l'intégration, et il n'y a pas de preuve que leurs résultats se soient diffusés en dehors du Kerala[5],[6],[7],[8].
Développements en séries et calcul infinitésimal
La contribution de l'école du Kerala inclut la série géométrique:
L'école du Kerala utilisait une forme «intuitive» du raisonnement par récurrence[3]. Cela leur permit d'obtenir une preuve (plus ou moins rigoureuse) de ce que:
pour n grand (mais ce résultat était également connu de Alhazen)[3].
Partant d'idées géométriques, ils obtinrent les développements en séries entières de sin x, cos x et arctan x[7],[11]. Le Tantrasangraha-vakhya donne ces séries sous forme versifiée; traduites en notation mathématique, elles deviennent[3]:
, où ;
;
; pour r = 1, on retrouve les séries usuelles, par exemple:
et
(mais l'école du Kerala n'utilise pas la fonction factorielle).
Leur démonstration de ces résultats passe par la rectification d'un arc de cercle (le calcul de sa longueur); ils ne découvrirent pas les méthodes de Leibniz et Newton (le calcul différentiel et intégral) utilisant des calculs d'aires[3]. Le développement en série de les amena à la formule pour (connue par la suite sous le nom de formule de Gregory-Leibniz)[3]:
.
Leurs approximations rationnelles des «erreurs» commises en tronquant les séries sont particulièrement remarquables. Ainsi, l'erreur (pour n impair, et i = 1, 2, 3) pour la série précédente est donnée par:
avec , chaque étant plus précis que le précédent.
Manipulant les termes de la série à l'aide de la décomposition en éléments simples de , ils obtinrent la série suivante, convergeant beaucoup plus rapidement[3]:
,
ce qui leur permit d'obtenir l'approximation , correcte à près[3],[12]; ils utilisèrent une notion intuitive de limite pour justifier ces résultats[3].
Les mathématiciens de l'école du Kerala découvrirent une forme de dérivation pour certaines fonctions trigonométriques: ils établirent les approximations suivantes (en notations modernes), confondant pour des petits arcs la longueur de l'arc et la valeur du sinus[13]:Ils ne définirent cependant pas la notion de fonction ou de dérivée en général, mais se servirent abondamment de ces approximations linéaires et furent capables de calculer l'approximation linéaire d'un quotient faisant intervenir de telles fonctions[14]. On trouve même chez Nilakantha une approximation affine de la fonction arcsin[15].
Arithmétique, algèbre et géométrie
La mise en place du développement en série de sinus, cosinus et arctan est considérée par de nombreux historiens comme la contribution la plus originale de l'école du Kerala[16],[15], mais ces mathématiciens ont également produit de nombreux autres travaux. On leur doit des commentaires des œuvres d'Aryabhata, Bhāskara I et Bhāskara II[16] avec des contributions originales concernant les preuves. Ainsi Nilakantha Somayaji fait une utilisation ingénieuse du volume d'un solide pour démontrer les formules de la somme des carrés et la somme des cubes d'entiers naturels dans son commentaire de l'Āryabhaṭīya[17].
De nombreux résultats ou techniques algébriques sont présentés avec des preuves géométriques[14]. Au XVIesiècle, Citrabhanu(en) résout (par des méthodes algébriques et géométriques) 21 types de systèmes de deux équations à deux inconnues, correspondant à tous les couples possibles d'équations de l'une des 7 formes suivantes[18]:
Dès le XVesiècle, les astronomes de l'école du Kerala sont conscients de la nécessité de réviser les constantes du mouvement des planètes par des observations plus poussées[22]. Ils remettent en question la validité des modèles du mouvement des planètes, et travaillent sur les prévisions des éclipses.
Madhava élabore une procédure permettant de déterminer la longitude vraie de la Lune toutes les 36 minutes[1].
Nilakantha émet l'idée que les planètes n'ont pas de lumière propre mais sont éclairées par le soleil[1]. Il améliore l'équation du centre des planètes intérieures[22]. Il présente un modèle planétaire dans lequel les cinq planètes Mercure, Venus, Mars, Jupiter et Saturne, tournent autour du Soleil qui, lui, tourne autour de la Terre[23].
Acyuta Pisarati(en) développe la technique de «réduction à l'écliptique» - une correction du mouvement des planètes destinée à tenir compte du fait que leur trajectoire dévie légèrement du plan de l'écliptique - à la même époque que Tycho Brahe[24].
Les travaux de l'école du Kerala furent décrits pour la première fois en Occident par C. M. Whish(en) en 1834, bien qu'un ouvrage antérieur, le Kala Sankalita de J. Warren (publié en 1825) mentionne brièvement la découverte des séries infinies par les astronomes du Kerala[25]. Selon Whish, les mathématiciens du Kerala avaient «établi les bases d'un système complet de fluxions» et leurs ouvrages étaient remplis de «formes fluxionnelles et de séries qu'on ne rencontrait nulle part ailleurs hors Occident[26]»; il s’agissait là d’un malentendu souvent repris par les historiens des mathématiques, Whish n’ayant pas eu accès aux méthodes de Madhava, et n’ayant pu imaginer qu’il ait obtenu ces résultats sans connaître les outils de l’Analyse[7].
Cependant, les observations de Whish furent presque complètement ignorées pendant plus d'un siècle, jusqu'à ce que les découvertes de l'école du Kerala soient étudiées à nouveau par C. T. Rajagopal(en) et ses collaborateurs à partir de 1950. Ceux-ci publièrent deux articles commentant des démonstrations duYuktibhasa concernant le développement en série de arctan[27],[28], un autre article commentant les démonstrations du Yuktibhasa[29], et deux études des vers sanskrits du Tantrasangraha-vakhya donnant les séries trigonométriques de sin, cos et arctan mentionnées précédemment, accompagnés de leur traduction en anglais et d'un commentaire[30],[31].
En 1979, A. K. Bag suggéra que la connaissance de ces résultats aurait pu parvenir en Europe par les routes commerciales vers le Kerala, transmise par des marchands ou des missionnaires jésuites[32]. Le Kerala étant à cette époque en relations continues avec la Chine, l'Arabie et l'Europe, la possibilité d'une telle transmission a été analysée par certains historiens des sciences[33],[34] , mais il n'en existe pas de preuve directe[34]. David Bressoud va même jusqu'à dire qu'il n'existe «aucune preuve de ce que ces travaux sur les séries aient été connus en dehors de l'Inde, ni même en dehors du Kerala, avant le dix-neuvième siècle[11]»[35].
Les mathématiciens arabes et indiens avaient découvert avant le XVIIesiècle des résultats que nous considérons à présent comme faisant partie du calcul infinitésimal[36]. Cependant, contrairement à Newton et Leibniz, ils ne parvinrent pas à «combiner des idées variées pour faire apparaître les deux thèmes unificateurs de la dérivation et de l'intégration, de découvrir le lien les unissant, et d'en faire l'outil puissant que nous connaissons aujourd'hui[36]». Les parcours intellectuels de Newton et de Leibniz sont bien documentés (ainsi d'ailleurs que ceux de leurs prédécesseurs immédiats, tels Fermat et Roberval), et rien ne permet de penser que leurs travaux aient été inspirés par l'école du Kerala[36]. La question de la transmission des travaux de cette école (en particulier dans les collections de manuscrits espagnols et maghrébins) reste cependant l'objet de recherches actives, certaines étant menées au CNRS, à Paris[36].
Bressoud 2002, p.12: «Il n'y a pas de preuve que les travaux indiens sur les séries aient été connus hors d'Inde, ou même hors du Kerala, avant le XIXesiècle. Gold et Pingree affirment qu'à l'époque où ces séries furent redécouvertes en Europe, elles avaient pratiquement été oubliées en Inde. Les développements du sinus, du cosinus et de l'arc tangente avaient été transmis à travers plusieurs générations de disciples; mais ce n'étaient plus que des observations stériles auxquelles personne ne voyait d'application pratique.»
Plofker 2001, p.293: «Dans des discussions concernant les mathématiques indiennes, il n'est pas rare de rencontrer des affirmations telles que «La notion de différentiation était comprise depuis l'époque de Manjula (au dixième siècle)» (Joseph 1991, p.300), ou que «l'on peut considérer Madhava comme le fondateur de l'analyse mathématique» (Joseph 1991, p.293), ou que Bhaskara II puisse être décrit comme «le précurseur de Newton et Leibniz dans la découverte des principes du calcul différentiel» (Bag 1979, p.294), etc. Les points de ressemblance, particulièrement entre les débuts du calcul infinitésimal en Europe et les travaux de l'école du Kerala sur les séries entières ont même suggéré une transmission des idées mathématiques entre la côte de Malabar au XVesiècle et le monde scolastique latin (par exemple Bag 1979)… Il faut cependant se rappeler qu'insister sur les ressemblances entre mathématiques sanscrites (ou malayalam) et latines risque de diminuer notre compréhension des premières. Parler de la «découverte des principes du calcul différentiel» obscurcit quelque peu le fait que les techniques indiennes pour exprimer les variations du sinus en fonction du cosinus ou vice versa, comme dans les exemples que nous avons vus, sont limitées à ce contexte trigonométrique spécifique. Le «principe» de la dérivation ne fut pas généralisé à des fonctions arbitraires.»
Pingree 1992, p.562: «Un exemple en est la démonstration de Mādhava, vers 1400 A.D., des séries entières des fonctions trigonométriques, utilisant des arguments géométriques et algébriques. Lorsqu'elle fut exposée pour la première fois en anglais par Charles Whish dans les années 1830, il l'annonça comme la découverte par les Hindous du calcul infinitésimal. Cette revendication, et les découvertes de Mādhava, furent ignorées par les historiens occidentaux, probablement au début parce qu'ils ne pouvaient pas accepter qu'un Hindou ait pu découvrir l'analyse, et par la suite parce que personne ne lisait plus les Transactions of the Royal Asiatic Society […] Nous disposons désormais d'une édition en sanscrit convenable, et nous comprenons la méthode ingénieuse qui permit à Mādhava d'obtenir les séries sans utiliser les outils de l'analyse, mais beaucoup d'historiens ne parviennent pas à envisager le problème et sa solution en dehors de ce cadre, et affirment donc que le calcul infinitésimal est ce que Mādhava découvrit. L'élégance et l'ingéniosité des mathématiques de Mādhava sont ainsi ensevelies sous la solution moderne du problème.»
Katz 1995, p.173-174: «Jusqu'à quel point les savants islamiques et indiens se sont-ils approchés de la découverte du calcul infinitésimal? Vers l'an 1000, les mathématiciens arabes avaient presque développé une formule générale d'intégration des polynômes et pouvaient clairement en obtenir une pour tout polynôme spécifique dont ils avaient besoin. Mais ils semblent ne s'être jamais intéressés à des polynômes de degré supérieur à 4, du moins dans les textes qui nous sont parvenus. Vers 1600, les mathématiciens indiens pouvaient utiliser la formule de sommation de ibn al-Haytham pour des puissances entières arbitraires, calculant des développements en séries entières des fonctions qui les intéressaient; vers la même époque, ils savaient également dériver ces fonctions. Ainsi, certaines des idées fondamentales du calcul infinitésimal étaient connues en Égypte et en Inde de nombreux siècles avant Newton. Cependant, il ne semble pas que ces mathématiciens aient vu l'intérêt de relier entre elles ces idées disparates; il semble bien qu'ils n'étaient intéressés que par des cas particuliers où ces idées devenaient nécessaires. Il n'est ainsi pas nécessaire de corriger l'affirmation selon laquelle Newton et Leibniz ont inventé l'analyse. Ce sont certainement eux qui furent les premiers à combiner ces différentes idées dans les deux grands thèmes unificateurs de la différentiation et de l'intégration.»
(en) Roy Wagner, «Citrabhānu's twenty-one algebraic problems in Malayalam and Sanskrit», Historia Mathematica, vol.42, no3, , p.263-279 (lire en ligne, consulté le )
(en) George Gherverghese, «Geometry in India», dans Helaine Selin, Encyclopædia of the History of Science, Technology, and Medecine in Non-Western Cultures=, Springer Verlag, , p.1011-1014, p. 1013.
En effet, Simon Antoine Jean L'Huilier la démontre dans son De relatione mutua capacitatis et terminorum figurarum, geometricè considerata seu de maximis et minimis, pars prior elementaris, p. 21
(en) Radha Charan Gupta, «Parameśvara's rule for the circumradius of a cyclic quadrilateral», Historia Mathematica, vol.4, no1, , p.67-74 (lire en ligne, consulté le )
(en) K. Ramasubramanian, M.D. Srinivas et M.S. Sriram, «Modification of the earlier Indian planetary theory by the Kerala astronomers (c. 1500 AD) and the implied heliocentric picture of planetary motion», Current Science, vol.66, no10, , p.784-790 (lire en ligne, consulté le ), Résumé
(en) K. Ramasubramanian, M. D. Srinivas et M. S. Sriram, «Modification of the earlier Indian planetary theory by the Kerala astronomers (c. 1500 A.D.) and the implied heliocentric picture of planetary motion», Current Science(en), vol.66, no10, , p.784-790 (lire en ligne).
(en) Charles Whish, «On the Hindú Quadrature of the Circle, and the Infinite Series of the Proportion of the Circumference to the Diameter Exhibited in the Four Sástras, the Tantra Sangraham, Yucti Bháshá, Carana Padhati, and Sadratnamála», Transactions of the Royal Asiatic Society of Great Britain and Ireland, vol.3, no3, , p.509-523 (DOI10.1017/S0950473700001221).
(en) C. Rajagopal et A. Venkataraman, «The sine and cosine power series in Hindu mathematics», Journal of the Royal Asiatic Society of Bengal (Science), vol.15, , p.1-13.
(en) D. F. Almeida, J. K. John et A. Zadorozhnyy, «Keralese Mathematics: Its Possible Transmission to Europe and the Consequential Educational Implications», Journal of Natural Geometry, vol.20, , p.77-104.
(en) D. Gold et D. Pingree, «A hitherto unknown Sanskrit work concerning Madhava's derivation of the power series for sine and cosine», Historia Scientiarum(en), vol.42, , p.49-65.
(en) C. K. Raju(en), «Computers, mathematics education, and the alternative epistemology of the calculus in the Yuktibhâsâ», Philosophy East and West(en), vol.51, no3, , p.325-362 (lire en ligne)
(en) Ranjan Roy(en), «Discovery of the Series Formula for π by Leibniz, Gregory, and Nilakantha», Mathematics Magazine, vol.63, no5, , p.291-306 (JSTOR2690896).
(en) Kim Plofker, «Mathematics in India», dans Victor J. Katz, The Mathematics of Egypt, Mesopotamia, China, ann Islam: A Sourcebook, Princeton University Press, (ISBN978 0 691 11485 9), p.385-512
(en) M. S. Sriram, «Kerala School of Astronomy and Mathematics», dans Helaine Selin, Encyclopædia of the History of Science, Technology, and Medecine in Non-Western Cultures, Springer Verlag, , p.1160-1164
David Pouvreau-Séjourné, Trigonométrie et «développement en séries» en Inde médiévale, Groupe d'histoire des mathématiques de l'IREM de Toulouse, (lire en ligne).
(en) R. C. Gupta, «Second Order of Interpolation of Indian Mathematics», J.of Hist. of Sc., vol.4, , p.92-94.
(en) Takao Hayashi, «Indian Mathematics», dans Ivor Grattan-Guinness, Companion Encyclopedia of the History and Philosophy of the Mathematical Sciences, vol.1, Baltimore, MD, The Johns Hopkins University Press, (ISBN0-8018-7396-7), p.118-130.
(en) Kim Plofker, «An Example of the Secant Method of Iterative Approximation in a Fifteenth-Century Sanskrit Text», Historia Mathematica, vol.23, no3, , p.246-256 (DOI10.1006/hmat.1996.0026)
(en) Kim Plofker, «Mathematics of India», dans Victor J. Katz, The Mathematics of Egypt, Mesopotamia, China, India, and Islam: A Sourcebook, Princeton, NJ, Princeton University Press, , 685p. (ISBN0-691-11485-4), p.385-514
(en) K. V. Sarma(en) et S. Hariharan, «Yuktibhasa of Jyesthadeva: a book of rationales in Indian mathematics and astronomy - an analytical appraisal», Indian J. Hist. Sci., vol.26, no2, , p.185-207
(it) Pietro Tacchi Venturi, « Lettre de Matteo Ricci à Petri Maffei du », in Matteo Ricci S.I., Le Lettre Dalla Cina 1580–1610, vol. 2, Macerata, 1613.