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Tout au long du xviiie siècle, de graves épizooties de peste bovine sévissent régulièrement sur le territoire français. L’épizootie apparue en 1743 ravage pendant plusieurs années l’élevage bovin, causant la disparition de la moitié du cheptel. C’est dans ce contexte que Louis XV signe le 4 août 1761 le décret portant création de l’École royale vétérinaire de Lyon, première école vétérinaire du monde, sur les conseils d’Henri Bertin, contrôleur général des finances et grand ami de Claude Bourgelat, initiateur de cette idée.
Malgré la création de l’école vétérinaire de Lyon puis de celle d’Alfort en 1765, l’efficacité des mesures de lutte contre les maladies animales reste très limitée. Ces difficultés s’expliquent par de nombreux facteurs : connaissances scientifiques insuffisantes, faible nombre de vétérinaires sur le terrain à l’inverse des charlatans et empiriques, manque de moyens financiers, organisation déficiente, etc.
La création de l’administration préfectorale en 1800, sous l’impulsion du Premier consul Bonaparte, donne les bases d’une fonction publique efficace. La déconcentration des décisions à l’échelon départemental assure en effet une réactivité qui faisait défaut auparavant.
La faiblesse de l’action sanitaire à l’égard de la protection du cheptel, particulièrement désastreuse pendant la campagne de Russie, conduit Napoléon Ier à exiger des autorités civiles et militaires de faire appel aux compétences de vétérinaires diplômés. De plus, un vétérinaire sanitaire référent est nommé dans chaque département pour remplir la fonction de conseiller du préfet. Le décret du 15 janvier 1813 constitue ainsi une première ébauche de services vétérinaires départementaux. Il est également à l’origine du concept de vétérinaire sanitaire, notion spécifique à la France, qui fait encore aujourd’hui des vétérinaires praticiens le bras armé de l’État pour les mesures de santé publique vétérinaire auprès de l’ensemble des détenteurs d’animaux.
La loi du 21 juillet 1881 sur la police sanitaire des animaux est une autre étape importante de l’organisation des services vétérinaires. Cette loi, concomitante de la création du ministère de l’Agriculture par Gambetta, organise le contrôle sanitaire aux frontières et met en place un service des épizooties dans chaque département. Les frais de ce service ne sont pas intégrés au budget de l’État, mais font partie des dépenses obligatoires mis à la charge des budgets départementaux.
Le dispositif reste cependant fragile, et les difficultés rencontrées dans la lutte contre les maladies contagieuses des animaux (notamment à l’égard de la fièvre aphteuse) font dire à Emmanuel Leclainche, professeur de pathologie des maladies contagieuses : « Il faut, en pareille matière, une unité de vues, une rapidité d’action qui exigent une direction unique pour tout un pays. »
La loi du 12 janvier 1909 permet de structurer l’organisation sanitaire vétérinaire sur l’ensemble du pays avec :
Auparavant assurée par des corps de métiers dépourvus de formation spécifique (souvent issus de la corporation des bouchers), « l’inspection de salubrité des comestibles » est confiée aux maires par la loi municipale de 1884. Ces derniers mettent progressivement en place un service vétérinaire d’inspection sanitaire. Les vétérinaires deviennent responsables de l’inspection sanitaire des animaux menés à l’abattoir ainsi que de l’inspection de la salubrité des viandes.
Théoriquement chargé de l’encadrement de l’activité des vétérinaires municipaux, le directeur départemental des services vétérinaires se trouve en réalité dans l’impossibilité de remplir cette mission. Cette situation conduit à une grande disparité des services vétérinaires municipaux et à des demandes récurrentes de réorganisation de cette inspection.
Le service vétérinaire sanitaire de Paris et du département de la Seine, rattaché à la Préfecture de Police, connaît un grand prestige.
Au début des années 1960, le développement des services vétérinaires connaît une véritable accélération, liée notamment aux discussions dans le cadre de la loi d’orientation agricole de 1960 ainsi qu’à l’émergence de la politique agricole commune en 1962. L’utilité de l’action sanitaire, longtemps proclamée par les services vétérinaires, est reconnue indispensable, notamment par les acteurs des marchés et des différentes filières.
Le corps des vétérinaires inspecteurs, créé en 1962, regroupe sous un même statut l’ensemble des vétérinaires d’État exerçant en métropole ou de retour des colonies pour donner suite aux mouvements d’indépendance.
La loi du 8 juillet 1965 « relative aux conditions nécessaires à la modernisation du marché de la viande » conduit à l’étatisation des services municipaux d’inspection des denrées d’origine animale au sein du ministère de l’Agriculture. Les vétérinaires de la Seine ainsi que l’ensemble des vétérinaires municipaux sont intégrés en 1968 au corps des vétérinaires inspecteurs.
La création d’un service d’État d’hygiène alimentaire constituera désormais un atout important dans les négociations préalables aux décisions communautaires afin d’éliminer les obstacles sanitaires à la libre circulation des denrées.
A partir du 1er janvier 1968, les Directions départementales des services vétérinaires regroupent les services départementaux des épizooties ainsi que les anciens services municipaux d’inspection, permettant ainsi la mise en place progressive d’une approche globale des enjeux sanitaires « du champ à l’assiette du consommateur ».
Les compétences techniques des services vétérinaires interviennent ainsi dans le champ économique, politique et social, avec l’émergence d’exigences croissantes des consommateurs en matière d’hygiène et de qualité des aliments à partir des années 1970.
En 1986, est décidée la création de la direction générale de l’alimentation (DGAL) au sein du ministère de l’Agriculture, qui succède à la direction de la qualité (DQ), elle-même remplaçant la direction des services vétérinaires (DSV).
En 1996, la première crise de « la vache folle » réaffirme la nécessité de donner aux préoccupations de santé publique la place prioritaire qu’elles méritent et remet en cause celle qui était accordée à l’économie.
Le corps des inspecteurs de la santé publique vétérinaire est créé en 2002 (décret 2002-262 du 22 février 2002) ; il se substitue au corps des vétérinaires-inspecteurs.
Le statut des ISPV est modifié en 2017 (décret 2017-607 du 21 avril 2017) ; les ISPV deviennent alors les inspecteurs de santé publique vétérinaire.
Actuellement, les inspecteurs de santé publique vétérinaire assurent la plus grande partie de l’encadrement des services vétérinaires, qui sont constitués d’ingénieurs, de techniciens supérieurs, de préposés et de personnels administratifs.
Leur profil et leurs métiers ont évolué, l’expérience de praticien vétérinaire et un apprentissage à l’abattoir n’est plus indispensable. La formation des ISPV les conduits, tout en affirmant le caractère technique du cœur de métier, à être également des cadres supérieurs de la fonction publique, à vocation interministérielle. Des non-vétérinaires peuvent ainsi accéder à ce corps.
Les préoccupations économiques et sociétales ont participé à la construction progressive des services vétérinaires français dans le but de prévenir et de lutter contre les crises sanitaires et de réduire la prévalence des maladies animales récurrentes. La situation actuelle, favorable sur le plan sanitaire, est le résultat d’une action continue ayant pour objectifs la maîtrise des maladies animales, une alimentation sûre, de qualité et durable ainsi que la protection de la santé humaine et de l’environnement, dans un contexte socio-économique en constante évolution.
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