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ensemble de peintres de paysage en Creuse De Wikipédia, l'encyclopédie libre
L'école de Crozant désigne, de façon informelle, une succession de colonies d'artistes pratiquant la peinture de paysage et qui s'étaient établis autour du village de Crozant, situé à la limite nord du département de la Creuse, d'où son nom.
Elle est composée d'une pléiade de peintres paysagistes qui, à partir des années 1850, travaillèrent sur les rives des deux Creuses (Grande Creuse et Petite Creuse), de la Sédelle et de la Gargilesse, à proximité des communes de Crozant, de Fresselines et de Gargilesse.
Ces colonies de peintres paysagistes se font plus rares à partir des années 1920. Deux facteurs expliquent cette désaffection. L'intérêt des artistes pour d'autres courants que ceux du paysagisme et la montée des eaux de la Creuse consécutive à la construction de l'un des plus grands barrages français de l'époque à Éguzon situé dans le département de l'Indre, partie prenante du groupement d'usines d'Éguzon.
C'est une école « sans maître », qui est une commode appellation, imaginée ultérieurement, pour désigner tous ceux qui ont trouvé l'inspiration dans ces vallées creusoises et berrichonnes. Durant près d'un siècle, près de 500 peintres fréquentèrent ces lieux[1]. Cette histoire est désormais contée aux amateurs d'art et de voyages touristiques à travers la Vallée des Peintres entre Berry et Limousin[2].
L'expression « école de Crozant » qui s'applique aux peintres paysagistes est toujours employée. Au côté de cette dénomination peu précise propre au XIXe siècle apparaît, depuis quelques années, une formulation patrimoniale englobant tout le périmètre visité par ces colonies d'artistes, celle de la « Vallée des Peintres » entre Berry et Limousin. Berry et Limousin fait le lien avec deux anciennes provinces hôtes de ces foyers artistiques[3]. Parmi les paysagistes qui ont fréquenté Crozant figurent des artistes d'envergure internationale comme l'impressionniste Armand Guillaumin ou le surréaliste Francis Picabia.
Au début du XIXe siècle, les critères artistiques s'étaient fixés autour de la tradition néoclassique, dans la suite du peintre Jacques-Louis David. En marge de cet académisme, le romantisme formalisé par Géricault, Bonington et Delacroix prenait de l'ampleur. En 1824, tandis que le Salon de Paris exposait quelques-unes des œuvres de John Constable, déjà Camille Corot trouvait en la forêt de Fontainebleau, à Barbizon, un lieu d'inspiration dans sa quête de nature. Une nouvelle génération de peintres abandonne peu à peu le formalisme académique et puise son inspiration dans la campagne : ils produisent des toiles souvent rurales, s'éloignant des scènes et drames mythologiques, du maniérisme, du bucolisme féerique, et surtout, ils quittent l'atelier pour le plein air, privilégient la peinture d'après nature, directement et face aux éléments. Peu avant la révolution de 1848, des peintres comme Gustave Courbet et Jean-François Millet (avec Un semeur (1850, musée des Beaux-Arts de Boston) ou Des glaneuses (1857, Paris, musée d'Orsay) étendent leurs visions aux personnages ruraux, peignant la paysannerie, les travaux des champs, le terroir, une évocation de la vie simple, sans mise en scène dramatique ni démonstration. Sur le plan littéraire, les influences de Jean-Jacques Rousseau et surtout de George Sand sont déterminantes.
Le village de Fresselines est située à une cinquantaine de kilomètres de Nohant la résidence de George Sand (1804-1876). Celle-ci, accompagnée d'hôtes prestigieux, appréciait les promenades dans les vallées creusoises autour de Fresselines et de Crozant. Elle évoquera Crozant ou Fresselines dans plusieurs de ses romans : Lettres d'un voyageur[4], Le péché de Monsieur Antoine[5], Jeanne[6]. George Sand se voit offrir en 1857 par son compagnon Alexandre Manceau une petite maison à Gargilesse-Dampierre à une dizaine de kilomètres de Crozant. Elle y passera de nombreux séjours.
La renommée de Crozant et de ses environs attire alors de nombreux artistes peintres.
Le terme d'« école de Crozant » apparaît en 1864 ; c'est un terme générique, aucun maître n'ayant jamais enseigné dans les vallées creusoises. De même, le terme d'« école de Barbizon » est créé en 1891. Cette appellation sert à qualifier une successions de peintres venus peindre voire s'installer à Crozant entre les années 1860 et jusqu'au milieu du XXe siècle.
Dès le début des années 1850, Jules Dupré (1811-1889) et Georges de Lafage-Laujol (1830-1858) y posent leurs chevalets. Armand Guillaumin (1841-1927), qui a eu la chance de gagner le gros lot de la Loterie nationale en 1891, est désormais débarrassé de tout souci matériel et peut se consacrer entièrement à la peinture. En 1893, après avoir exploré le Limousin dont la Creuse, il choisit Crozant comme résidence de prédilection. Non loin de l'église de Crozant, se trouve son buste en bronze. Claude Monet, au cours d'un séjour à Fresselines de mars à , réalise une série de tableaux sur le site du confluent des deux Creuses. Il produit 23 toiles dans la vallée[7].
Le poète Maurice Rollinat (1846-1903), filleul littéraire de George Sand, se retira à Fresselines en 1883 pour y continuer son œuvre. Il s'y entoure d'amis avec lesquels il partagera les dernières années de sa vie. Maurice Leblanc visita Rollinat, qu'il avait connu à Paris[10]. Les Névroses, publié chez Charpentier en 1883, annoncé dès 1882, est le recueil le plus célèbre de Rollinat. En 1886, il publiera l'Abîme, puis Paysages et Paysans ainsi qu'un recueil en prose En errant[11]. Claude Monet partagea la table de Rollinat à Fresselines en 1889. À sa mort en 1903, Auguste Rodin offre à la commune de Fresselines un bas-relief sculpté intitulé La Muse et son Poète. Cette sculpture est exposée sur le mur de l'église du village.
En 1926, une autre histoire commence pour les bords de Creuse, qui sont noyés par un barrage pour cause de production d'électricité, sous les eaux de la plus grande retenue d'Europe à l'époque, le barrage d'Éguzon[12]. Le nouveau pôle d'attraction touristique est désormais le lac de Chambon du nom d'un village de la commune d'Éguzon-Chantôme, riveraine du nouveau lac. Si les gorges profondes perdent alors une partie de leur caractère sauvage qui plaisait tant aux peintres, on y gagne une zone touristique à la « plage de Fougères ».
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